Comment la numérisation a-t-elle modifié les attentes des clients et comment pouvez-vous, en tant que courtier, y apporter une réponse ? Jan Verlinden, Insurance Leader Belgium de Capgemini Financial Services, répond à ces questions dans le rapport World InsurTech Report. La deuxième édition du rapport paraîtra début octobre, mais Jan vous explique déjà comment vous pouvez surfer sur la mouvance du numérique.

Le rapport World InsurTech Report cartographie l’incidence d’InsurTech sur le secteur des assurances. Quelles sont les conclusions les plus importantes ?

Jan Verlinden : « Lorsque les entreprises InsurTech sont entrées en scène, elles l’ont fait avec une certaine arrogance. Les innovateurs numériques étaient convaincus qu’ils pouvaient reprendre purement et simplement tous les processus des compagnies d’assurances. Cela s’est avéré moins évident qu’escompté. Depuis lors, ces startups ont prudemment revu leurs ambitions.

Aujourd’hui, les InsurTechs se concentrent plutôt sur un processus ou une partie de processus qu’il est possible de rendre plus convivial ou plus accessible au moyen des nouvelles technologies, avec quelques jolis succès comme résultat.

Ces dernières années, une collaboration est née entre compagnies d’assurances et InsurTech. Les deux parties sont conscientes de leurs points forts et se retrouvent pour obtenir une collaboration réussie. Cette interaction est responsable d’une forte évolution du secteur de l’assurance. »

Quelles tendances constatez-vous dans cette collaboration avec les entreprises InsurTech ?

« Les assureurs tentent d’intégrer l’écosystème du client. Traditionnellement, un assureur a peu de contacts avec ses clients, surtout en comparaison avec le secteur bancaire. Chaque semaine, les clients se connectent sur leur application bancaire mobile, vont chercher de l’argent et passent par l’agence bancaire. En revanche, 50% des clients n’ont de contact avec leur courtier qu’une fois par an : lorsque la facture atterrit dans leur boîte aux lettres. Même si vous pouviez, en tant que courtier, établir la plus belle facture imaginable, un paiement n’est jamais une expérience positive pour un client.

C’est pourquoi les assureurs sont à la recherche d’opportunités d’interaction avec le client. A de très nombreux moments de la vie de votre client, vous pouvez représenter une valeur ajoutée en tant que courtier, surtout avec les outils numériques appropriés.

Ainsi, il serait possible de développer une application qui vous rappelle que vous devez prendre vos médicaments. Cela rend la vie de votre client plus simple et fait également de l’assureur un partenaire sur le plan de la santé. En outre, le bon usage de la médication permet de réduire les frais de soins pour la compagnie d’assurances. Ainsi, tout le monde est gagnant.

Il est également possible d’associer une application comme Strava, qui enregistre vos prestations sportives, à votre assurance. Les clients qui mènent une vie saine peuvent, de cette façon, collecter des points bonus ou bénéficier d’une réduction sur leur prime.

En Belgique, il est également possible d’installer une application qui évalue votre comportement de conduite. Etes-vous un bon conducteur ? Dans ce cas, votre conduite prudente sera récompensée par une réduction sur la facture annuelle de votre assurance auto.

En collaboration avec les InsurTechs, les compagnies d’assurances découvrent qu’à de très nombreux moments de la vie d’un client, elles peuvent être un partenaire et offrir une valeur ajoutée. »

Il ressort de votre précédent rapport que les clients belges sont très satisfaits de leurs produits d’assurance.

« C’est exact. Nous établissons un Customer Experience Index depuis plus de cinq ans. Nous y mesurons la satisfaction du client. Sur chaque point d’interaction, nous mesurons également l’importance de cette étape pour un client. Ainsi, nous cartographions les attentes du client.

Le résultat est une matrice présentant cent interactions possibles entre client et courtier, de laquelle ressort une bonne image de l’expérience totale du client par pays. La Belgique obtient de bons résultats dans notre comparaison mondiale : notre pays figure chaque fois dans le top trois des pays examinés.

Les courtiers jouent un grand rôle dans cette note positive. Pour une majorité de Belges, le courtier est une personne de confiance avec laquelle ils entretiennent de bonnes relations. A l’avenir également, les courtiers pourront continuer de jouer un rôle important pour les clients. »

Vous avertissez tout de même les courtiers qu’ils ne peuvent manquer le train du numérique ?

« C’est exact. Si vous n’adoptez pas les nouvelles technologies en tant que courtier, vous ratez l’occasion de servir les clients du mieux possible. Presque tous les clients débutent leur recherche d’une assurance en ligne. Si un courtier n’est pas en ligne, ils ne pourront pas le trouver.

Par ailleurs, les clients s’attendent aussi à pouvoir contacter leur assureur de plusieurs manières. Les clients souhaitent pouvoir rechercher des informations sur une assurance à tout moment, en tout lieu et sur n’importe quel appareil, et déterminer eux-mêmes la façon de prendre contact.

Capgemini croit au modèle de multidistribution ou modèle multi-canal. A cet effet, tout l’art consiste à trouver un équilibre entre le monde numérique et le contact personnel. Si vous trouvez cet équilibre, la numérisation n’est pas une malédiction mais une opportunité pour servir encore mieux vos clients en tant que courtier. »

Les courtiers investissent-ils suffisamment dans la numérisation ?

« Je constate que la plupart des courtiers ont franchi le pas pour utiliser davantage de solutions numériques. Il s’agit d’une évolution positive, car le rôle des technologies numériques ne fera que croître. Autrefois, un courtier de 55 ans osait déclarer : je laisse toutes ces innovations loin de moi, je continue à travailler de la même manière.

Toutefois, les évolutions numériques se succèdent si rapidement qu’aujourd’hui, j’ose parler d’une révolution. Souhaitez-vous être encore présent sur le marché dans trois ans? Alors, il faut vous lancer. Aucun courtier ne peut se permettre de rester passif car il y a de nombreux changements, qui se produisent trop rapidement. »

Quels conseils pourriez-vous donner à un courtier qui souhaite poursuivre la numérisation ?

« Parlez-en à votre fédération professionnelle. La FVF s’emploie très bien à soutenir les courtiers, ai-je remarqué. Par ailleurs, les compagnies d’assurances se donnent également beaucoup de mal pour aider les courtiers à gérer le passage au numérique. Les courtiers ne sont pas obligés de tout faire eux-mêmes, ils peuvent adhérer à des initiatives existantes.

Enfin, je constate que des courtiers lisent avec attention notre World Insurtech Report. Ce rapport est bien accueilli chaque année dans le monde belge des assurances et peut être une manière intéressante de suivre de près les tendances et évolutions récentes.